Toi aussi tu as vu ça ? Toi aussi tu veux quitter Instagram ?
Depuis que Zuckerberg nous fait son revirement mascu opportuniste je vois passer plein de posts d’amis qui disent “je quitte Facebook”, d’autres qui cherchent des alternatives (spoiler alert : ça n’existe pas) ou de multiples stories Instagram de créatrices de contenus ou de petites marques qui sont obligées de se justifier et d’expliquer pourquoi elles ne quitteront pas la plateforme.
(Si tu as loupé le train, le milieu militant est pas mal agité depuis début janvier par la forte demande de boycott qui émane des utilisateur·ices depuis que Marco a multiplié les sorties “anti wokes” : fini le fact checking, stop aux politiques de diversité et “on veut plus d’énergie masculine” (pardon on en manquait ??))
J’aimerais te dire « youpi, tout le monde va enfin quitter Meta ! », moi qui multiplie les ras-le-bol d’Instagram depuis 5-6 ans.
Mais la réalité, c’est que je ne quitterai pas ces plateformes non plus.
J’utilise encore Facebook pour découvrir des jeux de rôle grandeur nature et des événements qui n’ont jamais trouvé mieux en termes de communication.
Instagram reste un espace investi, un endroit où partager ses idées, ses créations, s’inspirer des autres et trouver des connexions qui ont du sens.
Et si je déplore cette concentration totalement disproportionnée de nos énergies sur une seule et même plateforme, je ne me vois pas m’en détacher totalement.
C’est facile de demander aux créatrices de contenu de boycotter ces espaces, mais c’est oublier le temps démesuré qu’elles ont passé à bâtir leur communauté.
Ce travail colossal leur permet de faire croître leurs petites entreprises, souvent fragilisées par des algorithmes assassins.
Ce temps investi est délirant, et ça doit changer. Mais pour celleux qui ne font que consommer du contenu, c’est indécent de leur demander de partir.
Olympe rêve - militante féministe - le disait de façon assez cash (mais tellement vraie) il y a quelques semaines :
Désolée mais non je ne vais pas quitter Meta. Tout mon travail repose dessus, si je quitte meta demain je fais quoi ? Toute mon activité et mes revenus en dépendent.
Ça ne me plaît pas plus qu'à vous, mais bon ça fait 4 ans qu'on vous dit que c'est un problème cette concentration des réseaux sociaux dans les mains de megalo... on a saisit le défenseur des droits, on a poursuivi meta en justice.
Vous étiez où ?
Aujourd'hui vous faites quoi pour qu'on puisse s'émanciper et garantir un revenu pérenne à l'extérieur de Meta ?
Vous êtes inscrit à ma newsletter ? Vous achetez régulièrement sur la boutique sans voir mes posts ou stories ? Vous avez une alternative à me proposer qui me garantit des revenus à moi et ma salariée ? Qui me permettent d'ouvrir ma boutique à Marseille ? Vous allez me faire un prêt ? Un don ? Vous militez à nos côtés quand on demande un revenu de subsistance comme autrices ?
Bref, avant de nous demander si on reste ou on part interrogez vous
Et puis sans compter cet aspect (primordial) il faut se demander ce que ce boycott produira réellement.
Comme on vient de le vivre avec X (ex twitter) qui a vu la plateforme désertée par de nombreux médias depuis que Musk fait un usage ouvertement propagandiste de sa plateforme.
Si la véritable information, les fact checkers, les contrepoids s’en vont ?
Qu’est ce qui reste ?
C’est ce que partageait Taous Merakchi - autrice féministe - en story Instagram également la semaine dernière :
Pour les personnes qui se posent la question: je ne quitterai pas Instagram, pour deux raisons personnelles.
La première c'est que sans cette vitrine je suis tout bonnement à la rue, je perds tous mes revenus, c'est mon seul outil de promotion efficace pour les contenus qui me rapportent de l'argent.
La seconde c'est que j'ai reçu suffisamment de messages depuis le début de ma carrière et notamment ici, de gens ayant changé d'avis sur des questions importantes suite à du contenu qui a pu être partagé ou des discours qu'on a pu avoir sur des questions polarisantes pour que je reste convaincue de l'utilité d'occuper un espace comme celui-ci, qu'on y soit les bienvenus ou non.
Pour autant, je ne juge évidemment pas les gens qui souhaitent et peuvent en partir.
Je n'ai rien d'autre à ajouter pour le moment.
Bon je dis ça, moi j’ai quitté X parce que cette plateforme m’angoissait au possible, je la trouvais violente, les contenus que j’y voyais me laissaient dans un assez mauvais état psychologique quand je refermais l’appli.
J’y ai dit adieu à mes 14.000 followers et je suis partie sans regrets.
Partir pour se faire du bien oui, mais partir en pensant changer les politiques de ces plateformes j’y crois peu.
Beaucoup de militantes féministes sont d’ailleurs restées sur X, malgré la violence qu’elles y rencontrent (et merci à elles).
Et même si je crois au boycott quand ça risque d’avoir un impact économique sur ces sociétés, ça reste une forme de résistance passive et je crois que d’autres formes de résistances ont leur place.
Je vois par exemple se multiplier les posts “fake news” un peu drôles sur Zuckerberg assorties de mentions “fact checkées par un algorithme” une forme de contestation poétique presque subversive des utilisateur·ices.
Je pense depuis un moment que la solution n’est pas nécessairement de partir, mais de désengager une partie de notre temps, de notre attention et de notre investissement sur ces plateformes.
Tout simplement
Moins, mais mieux. Consulter des contenus ailleurs, sous d’autres formes.
Lutter contre l’addiction à ces outils (je m’inclue, je rechute souvent).
C’est là, selon moi, que se trouve le vrai changement.
Ne pas déserter, mais désinvestir.
Et leur faire perdre une partie de ce qu’ils ont construits, sans que nous soyons les seuls à tout sacrifier.
Avoir tout concentré au même endroit était de toutes façons une erreur stratégique de base, faute de temps pour s’investir ailleurs aussi parce qu’on n’a pas 4 bras…
Ça m’a demandé de l’énergie de maintenir un tant soi peu mes différents blogs et ma newsletter ces 10 dernières années pour ne pas laisser Instagram maître de ma communauté et je ne regrette pas.
Désinvestissez ces plateformes, utilisez les comme une parmi tant d’autres, au final ça ne prend pas plus de temps quand on arrête d’obséder sur une plateforme en particulier.
Et comme disait ma grand mère : ne mettez jamais tous vos oeufs dans le même panier.
Si tu as des questions sur comment désinvestir un peu Instagram ou Tik Tok pour toucher tes client·es ou tes followers j’ai lancé un chat ici sur le sujet pour donner mes petits trucs
🐝✨ Eleonore
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Merci pour cette belle Newsletter ! Cette phrase : Ne pas mettre tous ses œufs dans le même panier m'a poussé quelques semaines avant les grands exodes, me poussant avec facilité vers Bluesky. Et ça m'a aidée effectivement à appliquer à relativiser l'importance d'Instagram. Et je découvre actuellement avec plaisir Substack 😊
Il y a pixelfed 😊